jeudi 25 juin 2015

PROCHAINES PRESENTATIONS : DEBUT AOÛT 2015





Coquillages et Crustacés
Le monde sous le soleil...

"LE COEUR QUI TOURNE" de Donal Ryan (Albin Michel)



Meilleur livre de l'année 2013 en Irlande
Prix 2015 de Littérature de l'Union européenne
Irlande


Le Prix de Littérature de l'Union européenne a été créé en 2005. Le jury est composé de quinze membres bénévoles réunis en novembre à Strasbourg.


Donal Ryan est né en 1976 à Tipperary en Irlande. "Le coeur qui tourne" est son premier roman.

L'histoire :
C'est une petite ville d'Irlande, jolie et paisible. Tout le monde se connaît, aucun secret ne le reste longtemps, mais la vie est tranquille. Et puis soudain, c'est l'implosion. Du jour au lendemain, le patron de l'entreprise de bâtiment disparaît, parti à l'étranger -suppose-t-on -, abandonnant les ouvriers qui ne toucheront même pas d'indemnités-chômage puisqu'il n'a pas payé les cotisations. Des hommes se retrouvent sans emploi, sans revenu, et avec eux, toute une communauté est impactée par cette douloureuse situation. Des destins sont brisés, des rêves s'effondrent,  des familles sont anéanties, des amis s'éloignent... Certains se battent pour sortir la tête hors de l'eau. D'autres sombrent. Tous ne sont pas égaux face aux conséquences de ce désastre. Chacun a son histoire. Ils racontent...

Mon avis :
Ils sont vingt-et-un. Hommes, femmes, enfants. Vingt-et-un personnages qui prêtent leur voix à un drame économique et social, hélas, universel. Aux maux dus au chômage et à la perte de tout espoir, s'ajoutent jalousies, rumeurs infamantes, vieilles rivalités, brouilles familiales... "Comme pendant la guerre" disent certains, et les Irlandais savent de quoi ils parlent, l'être humain se révèle dans tout ce qu'il a de meilleur et de pire. Chacun témoigne, livre son histoire, se confesse. Tous ces parcours de vie s'entrecroisent, se recoupent, se réunissent, pour créer un seul et unique conte contemporain cruel et bouleversant.

Puzzle âpre, féroce et intense. Une très belle plume à découvrir et un nom à retenir !

"LA VERITE ET AUTRES MENSONGES" de Sascha Arango (Albin Michel)




Prix du Polar européen 2015
Allemagne


Sascha Arango est né en 1955 en Allemagne. Scénariste plusieurs fois récompensé, il écrit pour la télévision, la radio et le théâtre. "La vérité et autres mensonges", son premier roman, vient de recevoir le Prix du polar européen 2015.

L'histoire :
Henry et Martha vivent ensemble depuis neuf ans. Ils forment un couple heureux, sans histoires, lié par un secret, une "évidence silencieuse" acceptée par les deux époux. Elle, est une virtuose de la plume. Ses textes sont d'une qualité exceptionnelle. "Je veux juste écrire" confie-t-elle un jour à son mari étonné qu'elle ne publie pas. Alors, c'est lui qui cherche une maison d'édition, qui signe de son nom les romans de sa femme. Il assure les promotions, les lectures, les dédicaces avec beaucoup d'enthousiasme et joue à la perfection le rôle d'auteur de best-sellers. Mais chaque scénario impeccable a son grain de sable. Et le grain de sable s'appelle Betty, éditrice, maîtresse, et enceinte de Henry. Lui qui ne voulait pas d'enfant. Et certainement pas de Betty dont il n'est pas amoureux. Jusqu'à présent, le hasard lui avait toujours été favorable, le destin avait toujours fait les bons choix à sa place, transformant même les drames en opportunités. Mais aujourd'hui, la chance semble le lâcher. Comment dire la vérité à Martha ? Comment expliquer à Betty qu'il ne désirait pas être père et refuse de l'être ? Que va-t-il advenir de sa notoriété qu'il doit entièrement à son épouse ? Lucide, Henry prend conscience que cette fois sa vie prend un autre chemin et qu'elle va très vite se transformer en cauchemar...

Mon avis :
Le héros, Henry Hayden, profite, sans le vouloir en apparence, des hasards, parfois tragiques, qui ponctuent sa vie depuis son enfance. Est-il un homme ordinaire au destin hors du commun ? Ou a-t-il toujours été un monstre lâche et manipulateur ? C'est là toute la question de ce roman à l'intrigue originale. Toutefois, Prix du polar européen, on pouvait attendre un peu plus. De bonnes idées sont semées mais ne mûrissent pas et nous laissent sur notre faim. L'ensemble n'est pas approfondi et la psychologie des personnages assez pâle. Néanmoins, on lit l'histoire jusqu'au bout, sans déplaisir.

Un livre sympathique, idéal pour cet été !

"LES FANTÔMES DE BRESLAU" de Marek Krajewski (Folio policier)



Pologne


Marek Krajewski est né en 1966 en Pologne, à Wroclaw (Breslau en allemand). Linguiste, spécialiste de latin et de grec, il a été maître de conférences et professeur de latin avant de se consacrer entièrement à l'écriture de romans policiers historiques.

Quelques mots sur Breslau :
Ville aujourd'hui connue sous le nom de Wroclaw, elle sera en 2016 (avec la ville de Saint-Sébastien en Espagne) la capitale européenne de la culture. Située au pied des Sudètes, Wroclaw est une des villes les plus anciennes et les plus belles de Pologne.



(Hôtel de Ville de Wroclaw)


Son histoire est très riche :
  • Dans le royaume de Pologne de 990 à 1138 (construction de la première cathédrale)
  • Capitale du Duché de Silésie de 1138 à 1335
  • Sous la couronne de Bohême de 1335 à 1526 (centre important de commerce et d'artisanat)
  • Sous l'administration des Habsbourg de 1526 à 1741 (conversion de la ville au catholicisme et politique de germanisation)
  • De la Prusse à l'Allemagne (qui lui donnera le nom de Breslau) de 1741 à 1939 
  • La Seconde Guerre mondiale de 1939 à 1945 (Breslau résiste pendant trois mois à l'Armée Rouge, plus longtemps que Berlin mais plus de la moitié de la ville est rasée)
  • 1945 : Breslau est réincorporée à la Pologne et retrouve son nom Wroclaw
  • Renaissance de la ville de 1945 à 1970 (temps de la reconstruction, dégel de 1956 et années de croissance)
  • La décennie 1970-1980 et la naissance de Solidarnosc
  • La fin du communisme

Aujourd'hui :
La vieille ville est presque complètement restaurée, ses monuments préservés. La capitale silésienne est une ville européenne où se côtoient nombreux styles architecturaux, reflets de son histoire.

Personnalités littéraires :
  • Tadeusz Rozewicz (1921-2014), poète et dramaturge, a vécu et est décédé à Wroclaw
  • Marek Hlasko (1934-1969), le "James Dean" polonais, a vécu un temps à Wroclaw
  • Theodor Mommsen (1817-1903), Prix Nobel de Littérature en 1902, a enseigné à Breslau
  • Gerhart Hauptmann (1862-1946), Prix Nobel de Littérature en 1912, a étudié à Breslau 

L'histoire du roman :
2 octobre 1919. Le commissaire de la Police criminelle de Breslau, Heinrich Mühlhaus, et Eberhard Mock, son assistant tout droit venu de la Brigade des moeurs, se retrouvent tôt ce matin-là dans un café de la ville. Mock est dans un sale état. Il n'a pas dormi depuis quatre jours et menace de donner sa démission. Mühlhaus lui réaffirme sa confiance ; il a vraiment besoin de lui au sein de la nouvelle commission des meurtres, à condition qu'il en soit capable physiquement et psychologiquement, et qu'il lui détaille les événements de ces derniers jours. Mock se décide alors à tout raconter sur "l'affaire des marins".
C'était il y a un mois, le 1er septembre 1919. A huit heures du matin, Mock est conduit par l'un de ses coéquipiers sur une île au milieu de l'Oder où il découvre une scène de crimes particulièrement éprouvante. Quatre corps, des jeunes hommes, gisent sur le sol boueux, enchevêtrés d'une manière étrange, couverts d'hématomes, les yeux crevés, les membres disloqués, uniquement vêtus d'un bonnet de marin sur la tête et d'un cache-sexe en cuir couvrant les parties génitales. Sur l'un des cadavres, on trouve un billet énigmatique directement adressé à Mock...

Mon avis :
Dès les premières lignes, on est piégé dans la toile et on ne peut plus se libérer. Un roman sombre et puissant aux références à la littérature et à la mythologie grecques captivantes. Une approche très intéressante des débuts de la psychologie et de la médecine légale. L'auteur crée une atmosphère personnelle dans laquelle on se fond immédiatement. Le réalisme de la reconstitution historique de la ville et de ses difficultés politiques et sociales de l'époque est fascinant. On ne peut qu'être séduit et en totale empathie avec le héros, Eberhard Mock, traumatisé de la Grande Guerre, que les fantômes des tranchées hantent toutes les nuits, et dont le seul remède aux cauchemars est l'alcool le plus fort possible.

Noir, intelligent, excellent !

"LA TRILOGIE BERLINOISE" de Philip Kerr (Le Livre de Poche)



Prix des lecteurs - roman policier 2010
Allemagne - Auteur écossais

Trois volumes réédités en un seul ouvrage :

"L'Eté de cristal"
Prix du roman d'aventure 1993
Prix Mystère de la critique 1994

"La Pâle Figure"

"Un requiem allemand"


Philip Kerr est né en 1956 à Edimbourg, en Ecosse. Il a fait des études de droit à l'université de Birmingham, a travaillé dans la publicité et comme journaliste indépendant avant de se lancer dans l'écriture de fictions. "La trilogie berlinoise", qui traverse Berlin de 1936 à 1947, a reçu le Prix des lecteurs - roman policier en 2010.

"Voilà ce qu'était devenue Berlin sous le gouvernement national-socialiste : une vaste demeure hantée pleine de recoins sombres, d'escaliers obscurs, de caves sinistres et de pièces condamnées, avec un grenier où s'agitaient des fantômes déchaînés qui jetaient des livres contre les murs, cognaient aux portes, brisaient des vitres et hululaient dans la nuit, terrorisant les occupants au point qu'ils avaient parfois envie de tout vendre et de partir. Pourtant, la plupart se contentaient de se boucher les oreilles, de fermer les yeux et de faire comme si tout allait bien. Tout apeurés, ils parlaient peu, faisaient mine de ne pas sentir le tapis remuer sous leurs pieds, et les rares fois où ils riaient, c'était du petit rire nerveux qui accueille poliment les plaisanteries du patron."
Philip Kerr
"L'Eté de cristal"

L'histoire :
Berlin, 1936. L'Allemagne se prépare à accueillir les Jeux Olympiques.
Bernhard Gunther, enquêteur privé, assiste aujourd'hui au mariage de sa secrétaire. Au lieu de s'en réjouir, c'est à regret qu'il félicite les mariés car Dagmarr ne travaillera plus pour lui. Plus d'une fois il eut envie de lui demander de l'épouser mais à trente-huit ans il était évidemment trop vieux pour elle. La belle préféra un jeune et beau pilote de la Lufthansa à qui Gunther ne cache pas son peu de sympathie pour le National Socialisme. Hardiesse de plus en plus risquée en cette Allemagne du Troisième Reich. Gunther le sait bien. La plupart de ses clients sont des Juifs à la recherche de proches disparus.
Passablement éméché, au milieu de la nuit, Gunther quitte la fête et n'aspire qu'à s'endormir dans son lit. Malheureusement, devant son domicile l'attendent trois hommes qui l'invitent avec conviction à monter dans une Mercedes noire. Une personne mystérieuse souhaite louer ses services. Gunther est conduit auprès de Hermann Six, un des plus gros industriels de la Ruhr. Il y a trois jours, sa fille, Grete, et son gendre, Paul Pfarr, ont été abattus de plusieurs balles, leurs corps ensuite brûlés dans l'incendie de leur maison, et des bijoux de grande valeur ont disparu du coffre-fort. Six veut le ou les coupables de ces actes abominables et exige la discrétion. Gunther accepte le contrat lucratif.
Le lendemain matin, il commence ses investigations. D'abord il apprend que le couple Pfarr battait de l'aile. Puis il obtient quelques adresses de revendeurs peu scrupuleux. Par ailleurs, il découvre avec étonnement que Hermann Goering lui-même est un grand amateur d'objets de luxe, les pierres précieuses en particulier, et qu'il est prêt à tout pour en posséder...

Mon avis :
Les deux premières parties sont un hommage à Dashiell Hammett et à Raymond Chandler. On retrouve avec beaucoup de plaisir tous les codes du roman noir américain des années 1930 à 1950 : la figure mythique du détective privé à l'imperméable sombre et au chapeau gris, solitaire, libre, élégant, un brin macho mais charmant ; cigarettes, alcool, jolies femmes, revolvers, bagarres musclées, clients fortunés, indics, mafieux, ripoux, balances, (rares) amis loyaux. De l'insolence et de l'humour mordants insufflent une brise rafraîchissante à la gravité du contexte historique.
La troisième partie, plus ténébreuse, n'est pas sans rappeler l'oeuvre de John Le Carré et les romans d'espionnage sur l'époque de la Guerre Froide.
Pour chaque épisode, l'auteur met en premier plan une enquête criminelle très bien ficelée, et en toile de fond l'Histoire, répercutant ainsi, avec un grand réalisme, le climat de suspicion et de peur dans le quotidien de ses personnages. A décrire l'horreur, Philip Kerr préfère s'interroger et réfléchir sur comment tout cela fut possible, comment un peuple cultivé a pu être entraîné dans une telle folie.
Cette trilogie évoque trois périodes de l'histoire de l'Allemagne. 1936 et 1938 : la montée du nazisme, les Jeux Olympiques de Berlin, les accords de Munich, la Nuit de Cristal, le rôle des bras droits de Hitler... 1947 : Berlin en ruine, le plan Marshall (empêcher la propagation du communisme), l'occupation de Berlin divisée en une zone soviétique et plusieurs zones occidentales (réparties entre la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis), la reconstruction, la "dénazification", et plus tard la création des deux Allemagnes...
Mille pages qui se dévorent d'une traite ! A la fois instructif et divertissant, intelligent et fluide, ce roman témoigne de la cupidité et de la cruauté humaine.

"Le pâle ciel d'automne était empli de l'exode de millions de feuilles que le vent déportait aux quatre coins de la ville, loin des branches qui leur avaient donné vie. Ici et là, des hommes au visage de pierre travaillaient avec lenteur et concentration pour contrôler cette diaspora végétale, brûlant les branches de frêne, de chêne, d'orme, de hêtre, de sycomore, d'érable, de marronnier, de tilleul et de saule pleureur, tandis que l'âcre et grise fumée flottait dans l'air comme le dernier souffle d'âmes perdues. Pourtant, d'autres feuilles continuaient à tomber, à tomber sans cesse, de sorte que les tas se consumaient sans diminuer, et tandis que je regardais rougeoyer la braise des feux en humant les gaz chaud de cette mort végétale, il me sembla sentir l'odeur de la fin de toute chose."
Philip Kerr
"La Pâle Figure"

POESIE EUROPEENNE



"L'Europe en Poésie"

http://cache.media.education.gouv.fr/file/europe_et_international_2/76/6/europe-en-poesie_39766.pdf